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Page:Jarry - L’Amour en visites, 1898.djvu/56

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l’amour en visites

« Mais les philosophes ont affirmé que la volonté était le levier magique, et que l’idée créait l’acte.

« Viens donc : par notre souverain vouloir nous serons les tout-puissants de ce monde. Toutes les œuvres de l’esprit seront notre magnifique trophée ; nous les réaliserons en nous-mêmes. Nous serons les héros chantés par les poètes, les dominateurs conservés par l’histoire, les conquérants acclamés par les guerriers. Nous serons jeunes et impérissables, nous aurons toutes les fleurs, tous les fruits, tous les parfums, toutes les essences.

« Viens ! les élans de mon être se précipitent vers toi, comme d’ardents coursiers que le cavalier peut à peine retenir, et qui vont bientôt l’emporter d’un galop furieux à travers le fleuve des désirs.

« Viens, j’entends s’approcher les fanfares des marches triomphales ; nous monterons vivants au Walhal. Au lieu d’hydromel je te verserai l’extase, je te donnerai les joies de la pensée.

« Viens, nul ne pourrait s’égaler à moi. Je connais le désespoir d’Orphée et le déchire-