Page:Jaurès - Histoire socialiste, VI.djvu/246

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reraient la grève, la police fit cerner la maison et arrêta sept ouvriers[1]. Inutile de dire ce qu’ils devinrent. Nous avons, sur une grève plus sérieuse qui unit les ouvriers en bâtiment de Paris contre une ordonnance de police, répartissant les heures de travail dans la journée, une série de rapports de Lacretelle très intéressants[2]. Ils nous font suivre au jour le jour le mouvement et nous indiquent, avec les modes de répression employés dans quel esprit, sous l’Empire, on envisageait une « coalition ». Le premier rapport est du 6 octobre 1806 : « Les ouvriers en bâtiment ont témoigné, depuis trois jours, quelque mécontentement au sujet de l’ordonnance de police qui détermine la durée de leurs journées et les heures de leurs repas en hiver et en été. Suivant plusieurs mutins d’entre eux on les traitait comme des bêtes de somme etc. Ces insinuations étaient fortifiées, à ce qu’on pense, par des entrepreneurs subalternes qui jalousent [les grands établissements][3] ceux qui tiennent les grands ateliers publics. Aujourd’hui, les ouvriers attachés aux travaux du palais impérial, du Corps législatif et généralement de toutes les constructions publiques, ont refusé de travailler. 27 des plus mutins [qui péroraient et excitaient leurs camarades][4] ont été [enlevés du milieu des groupes][5] arrêtés dans les groupes qu’ils péroraient et excitaient ; ils sont déposés à Bicêtre. Les autres ne se sont dispersés et ne sont point présentés à leur travail. On surveille ceux qui sont restés dans les baraques et cabarets avoisinant leurs ateliers. Tous les ouvriers des entrepreneurs particuliers ont travaillé comme à l’ordinaire, les maîtres n’ayant rien changé aux heures de travail et des repas. On s’est assuré que les ouvriers occupés aux travaux du gouvernement sont régulièrement payés et qu’il ne leur est rien dû en ce moment ». Le 7 octobre : « Les ouvriers en bâtiment employés aux travaux du gouvernement ont persisté encore aujourd’hui dans leur refus de travailler et de se soumettre au règlement de police qui fixe les heures de travail et des repas. M. le Conseiller d’État, préfet de police, a fait arrêter trois de ces ouvriers hier dans la journée, ce qui porte à 30 (sic) le nombre des arrestations. Ce matin, 9 de ceux qui étaient détenus se sont soumis à reprendre leur travail et ont été mis en liberté. Il n’a point paru que leur exemple ait rappelé d’autres ouvriers et les ateliers ont été déserts, comme hier.

Une affiche calomnieuse contre les bureaux de l’intérieur et de la préfecture de police a été vue ce matin sur les murs au palais des Thuileries (sic). L’officier de garde l’a fait disparaître. MM. les questeurs du Corps législatif dénoncent un homme de peine chargé de frotter les appartements de M. le

  1. Archives Nationales F7 3704. Brumaire an XII.
  2. Archives Nationales F7 3711.
  3. Biffé sur l’original.
  4. Biffé sur l’original.
  5. Biffé sur l’original.