Page:Jaurès - Histoire socialiste, VI.djvu/478

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l’éclat ou à ramener un souvenir favorable aux Bourbons. Je suis disposé à conserver le Journal des Débats, si l’on me présente pour mettre à la tête de, ce journal un homme en qui je puisse avoir confiance, et pour rédacteurs des hommes sûrs, qui soient prévenus contre les manœuvres des Anglais et qui n’accréditent aucun des bruits qu’ils font répandre… Toutes les fois qu’il parviendra une nouvelle désagréable au gouvernement, elle ne doit point être publiée jusqu’à ce qu’on soit tellement sûr de la vérité qu’on ne doive plus la dire, parce qu’elle est connue de tout le monde. Il n’y a point d’autre moyen d’empêcher qu’un journal ne soit point arrêté. »

Une lettre de Napoléon adressée à Fouché, le 4 août 1804, exprime les sentiments de l’empereur à l’égard du Citoyen :

« Ce détestable journal paraît vouloir ne se vautrer que dans le sang. Voilà huit jours de suite qu’il ne nous entretient que de la Saint-Barthélemy. Quel est donc le rédacteur de ce journal ? Avec quelle jouissance ce misérable savoure-t-il les crimes et les malheurs de nos pères ! Mon intention est qu’on y mette un terme. Faites changer le directeur de ce journal ou supprimez-le, et, sous quelque prétexte que ce soit, défendez qu’on emploie ce style dégoûtant et bas de la Terreur, qui avait au moins un but, celui de défricher les institutions existantes. Que, sous aucun prétexte, il ne se mêle de religion… »

Deux autres lettres, sur le même objet, méritent d’être enregistrées. La première est d’avril 1805, à Fouché.

« Réprimez un peu plus les journaux ; faites-y mettre de bons articles. Faites comprendre aux rédacteurs du Journal des Débats et du Publiciste que le temps n’est pas éloigné où, m’apercevant qu’ils ne sont pas utiles je les supprimerai avec tous les autres et n’en conserverai qu’un seul… Mon intention est donc que vous fassiez appeler les rédacteurs du Journal des Débats, du Publiciste, de la Gazette de France pour leur déclarer que s’ils continuent à n’être que les truchements des journaux et des bulletins anglais et à alarmer sans cesse l’opinion, en répétant bêtement les bulletins de Francfort et d’Augsbourg, sans discernement et sans jugement, leur durée ne sera pas longue ; que le temps de la Révolution est fini et qu’il n’y a plus en France qu’un parti ; que je ne souffrirai jamais que mes journaux disent ni fassent rien contre mes intérêts ; qu’ils pourront faire quelques petits articles où ils pourront montrer un peu de venin, mais qu’un beau matin on leur fermera la bouche. »

Autre lettre : « Remuez-vous donc un peu plus pour soutenir l’opinion. Dites aux rédacteurs que, quoique éloigné, je lis les journaux ; que, s’ils continuent sur ce ton, je solderai leur compte ; qu’en l’an VIII je les ai réduits à 14… Dites-leur (aux rédacteurs) que je ne les jugerai point sur le mal qu’ils auront dit, mais sur le peu de bien qu’ils n’auront pas dit… Oiseaux de mauvais augure, pourquoi ne présagent-ils que des orages éloignés ? Je les