Page:Jaurès - Histoire socialiste, VI.djvu/589

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans les départements méridionaux, où il est seulement permis de tenter la culture du coton,

« Dans cette circonstance, il semble que le gouvernement devrait se borner à donner la prime promise d’un franc par kilog. de coton récolté, épuré et prêt à être filé. La continuation de cette prime individuelle suffirait aux cultivateurs qui s’adonnent à une semblable exploitation, et leur conserverait une récompense que les circonstances pourraient leur permettre, d’attendre et de recevoir. »

Donc, en définitive, la culture du coton ne saurait entrer en ligne de compte dans ce rapide bilan que nous voulons tracer de la prospérité agricole d’alors. C’est l’élevage qui, nous l’avons déjà dit, réalisa les progrès les plus incontestables. L’introduction du mérinos avait eu les plus heureux résultats, et l’industrie fut mise en possession d’une grande variété de laines pouvant servir à la fabrication des tissus les plus fins comme les plus ordinaires.

En 1812, on évalue aux chiffres suivants le bétail de la France : 214 000 taureaux, 1 700 000 bœufs, 3 999 000 vaches, 850 000 génisses.

On estime que les divers travaux de l’agriculture occupent 1 500 000 chevaux.

La sériciculture est aussi en plein développement : on récolte en douze départements des cocons qui produisent 5 millions et demi de kilogrammes de soie représentant une valeur d’environ 15 millions et demi de francs.

Voulons-nous connaître maintenant les variations des cours du blé, de 1800 à 1813 ? Les voici telles qu’elles sont fournies par une statistique de l’Académie des sciences morales et politiques :

Prix de l’hectolitre de froment : 1800, 21 fr. 50 ; 1801, 24 fr. 37 ; 1802, 24 fr. 16 ; 1803, 18 fr. 81 ; 1804, 20 fr. 18 ; 1805, 20 fr. 18 ; 1806, 20 fr. 18 ; 1807, 18 fr. 60 ; 1809, 15 fr. 17 ; 1810, 19 fr. 61 ; 1811, 26 fr. 13 ; 1812, 34 fr. 34 ; 1813, 22 fr. 51.

On voit les écarts considérables qui se produisent entre certaines années, écarts qu’il est impossible d’attribuer uniquement à l’abondance ou à la faiblesse des récoltes. La spéculation sévissait, hélas ! cruellement dès cette époque, à ce point que Napoléon jugea nécessaire d’intervenir.

Comme il avait fait faire, en 1811, d’énormes achats de grains pour le ravitaillement des greniers de Paris, la spéculation profita du mouvement de hausse et parvint à pousser le cours de la farine jusqu’à 80 francs au lieu de 72.

L’administration s’émut et, pour faire baisser les cours, vendit des sacs de farine à 73 francs. Mais, comme au lieu de céder, la spéculation redoubla son effort au point de faire monter le prix de la farine jusqu’à 110 francs, en avril 1812, un décret de la même année mit fin à ces scandaleuses manœuvres en défendant aux particuliers de faire des achats de grains et de farine