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Page:Johann David Wyss - Le Robinson suisse (1861).djvu/91

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le robinson suisse.

s’inquiéter en voyant diminuer de jour en jour les quelques pelotons sauvés par elle du naufrage.

Fritz, en son nom propre et au nom de ses frères, déclara le karatas supérieur à l’ananas ; seulement il regrettait que les plantes que nous examinions eussent, pour la plupart, beaucoup d’épines. Je lui expliquai que ces épines et ces aiguillons rendaient les cactiers et les nopals ou raquettes très-utiles pour faire de bons murs de clôture infranchissables aux bêtes féroces les plus audacieuses. Ernest examinait avec une profonde attention une figue épineuse toute couverte de petits insectes rouges qu’il ne parvenait point à faire tomber. « Serait-ce la fameuse cochenille ? me demanda-t-il.

— Tu as deviné juste, lui dis-je ; oui, c’est la cochenille, qui donne la belle teinture écarlate si estimée dans le commerce, et qui se vend à un prix si élevé. »

Tout en continuant de parler sur ces merveilles de la nature, nous arrivâmes à la rivière du Chacal, qui fut traversée dans un endroit guéable : pour passer sur notre pont, il eût fallu remonter beaucoup trop loin ; nous revîmes notre tente (Zeltheim), où tout était en ordre. Nous prîmes du beurre, pendant que Jack et Ernest parvenaient, non sans peine, à se rendre maîtres d’une paire d’oies et d’une paire de canards ; ils durent même les pêcher, pour ainsi dire, au moyen de longues ficelles auxquelles ils attachèrent des petits morceaux de fromage que les oiseaux aquatiques avalèrent gloutonnement. Turc, qui avait été couvert d’une espèce de cotte de mailles faite avec les dards du porc-épic, se vit avec plaisir débarrassé de ce singulier accoutrement, et porta une charge de sel fixée par des cordes sur son dos. Nous mêlâmes nos éclats de rire aux cris des oies et des canards, qui semblaient dire adieu à la baie de Zeltheim, et aux aboiements de nos chiens ; puis nous repartîmes pour Falkenhorst par le grand pont, et, sans encombre, nous arrivâmes à notre gîte.