Page:John Ruskin par Frédéric Harrison.djvu/136

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le bouillonnement impossible à réprimer d’une nature brillante, toute débordante d’enthousiasme, chevaleresque et affectueuse : un enfant n’aurait pu, dans son étourderie, dire ce qu’il éprouvait ou désirait avec plus de liberté et moins d’artifice et il était humble, modeste et simple comme une jeune fille. Ses idées, ses admirations, ses craintes, semblaient jaillir de son esprit et s’échapper sans contrôle ; mais (dans l’intimité) c’était toujours ce qu’il aimait non ce qu’il détestait qui éveillait son intérêt ; cela pouvait paraître extraordinaire chez un homme qui, la plume à la main, traitait tout ce qu’il haïssait ou méprisait avec une violence sauvage, qui, même dans les lettres à ses meilleurs amis, usait des mots les plus amers et qu’on accuse habituellement d’une arrogance et d’une suffisance démesurées. Le monde ne peut juger ses écrits que tels qu’il nous, les adonnés, mais je ne puis dire qu’une chose, c’est que, dans les rapports personnels, lorsqu’il était bien portant, je ne l’ai jamais vu se permettre un mot désagréable, une phrase discourtoise, un jugement malveillant, ni donner une preuve quelconque d’égoïsme. D’homme à homme, il se montrait le plus modeste, le plus bienveillant, le plus patient des auditeurs, toujours déférent pour le jugement d’autrui et même sur des sujets où il n’était plus un écolier, désireux seulement d’apprendre en-