Aller au contenu

Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1903, Tome 2.djvu/199

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
189
L’ILE DU DIABLE


lui-même. Il s’était fait récemment remarquer, et un peu craindre, par son opposition à la loi sur les menées anarchistes et par la défense qu’il avait présentée de quelques penseurs révolutionnaires, Jean Grave[1], Fénéon[2], témoignant en cour d’assises et bataillant dans les journaux[3]. C’était quelques-uns de ces anarchistes qui avaient parlé de lui au directeur de la Santé.

L’un des beaux-frères de Dreyfus[4] se rendit chez le jeune écrivain. Il le trouva déjà plein de doutes, non qu’il connût autrement l’accusation que par les journaux, mais la fureur de la presse antisémite l’avait conduit à croire que l’affaire était le résultat d’une machination. Bernard Lazare se rencontra ensuite avec Mathieu, qui lui exposa tout ce qu’il savait et le tint, désormais, au courant de ses recherches (fin février 1895).

Un peu plus tard, quand Mathieu lui proposa de publier un mémoire où seraient exposées, pour la première fois, et discutées les charges du procès, il accepta, sans une hésitation et plein de feu pour une aussi noble cause.

Il écrivit la première esquisse de son mémoire au printemps de cette même année, au moment même où la Chambre votait la loi sur la revision des erreurs judiciaires, qui fut promulguée le 8 juin.

Quand Mercier essayera, par la suite, de justifier

  1. Poursuivi, le 26 février 1893, pour son livre : la Société mourante et l’Anarchie, et condamné à deux années de prison, Grave était un ami de Reclus et du prince Kropotkine.
  2. Impliqué dans le procès des Trente avec Grave, Paul Reclus, Sébastien Faure, Alexandre Cohen, etc., il fut défendu par Demange et acquitté ainsi que tous les écrivains poursuivis dans cette affaire (août 1894).
  3. Écho de Paris et Journal.
  4. Joseph Valabrègue, de Carpentras.