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MORT DE FÉLIX FAURE


compte, si la justice s’avisait de vouloir voir clair dans cette affaire et dans les opérations parallèles. Le duc de Luynes avait passé toute l’après-dînée avec Buffet « à attendre le résultat de la tentative » et l’arrivée des troupes entraînées par Déroulède[1] ; maintenant, ils attendaient la police. Guérin, après avoir assisté jusqu’au bout à la déconfiture de Déroulède, s’était barricadé chez lui avec une soixantaine de ses hommes qui le gardèrent jusqu’à 2 heures du matin[2]. Enfin, le duc d’Orléans, qui avait conféré dans la matinée avec des émissaires, envoyé plusieurs courriers à Paris[3] et couru toute l’après-midi et le soir, avec Chevilly et Monicourt, pour dépister les agents d’Hennion[4], reçut assez tard ce télégramme de Buffet : « Inutile venir, enverrons demain nouvelles…[5] », et il alla se coucher assez piteusement[6], sans même répondre, comme il l’avait fait, une autre fois, à une dépêche qu’il n’avait pu déchiffrer, par le mot en cinq lettres qui fut prononcé à Waterloo[7].

La République avait échappé à l’embuscade, et la voie semblait libre devant la Justice.

  1. Rapport du préfet de police Ch. Blanc, de mars 1899 (I, 7) et Haute Cour, 7 décembre.
  2. Ibid., et Rapport Hennion. (24 et 25 février 1899.)
  3. Rapport du 25 février 1899.
  4. Haute Cour, 5 décembre 1899, Hennion. (Rapport spécial du 24 février 1899.)
  5. Ibid., I. 110.
  6. À minuit et demi. (Rapport spécial.)
  7. Dépêche du 12 décembre 1898. — Buffet répliqua par sa démission, qu’il retira à la suite d’une lettre du duc, s’excusant de lui avoir envoyé « un télégramme de blague ». La dépêche saisie chez Buffet fut déchiffrée par le commandant Bazeries. (Haute Cour, V, 171 à 174, Buffet ; et 26 décembre 1899, réquisitoire du procureur général Bernard.)