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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/110

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


en droit : le papier pelure d’Esterhazy, le faux d’Henry, l’inanité des prétendus aveux.

Comme la commission consultative n’avait pas admis que le faux d’Henry constituât un fait nouveau, ses anciens membres, Petit, Crépon et Lepelletier, tenaient fort, rien que par amour-propre, à le faire écarter une fois de plus par les Chambres réunies. La grande lumière qui avait, illuminé tant de consciences et d’où était sortie la revision, n’éclairera point l’arrêt. Bernard, Fabreguettes, d’autres encore, dirent que c’était un défi au bon sens. Pourtant cela fut voté, à une voix, parce que des conseillers de la majorité étaient les amis des intéressés ou qu’ils virent dans cette concession le moyen de rallier à l’arrêt affaibli la Cour tout entière.

Le considérant qui écartait, ruinait la légende des aveux, ne rencontra pas une moindre opposition.

Battus sur les aveux, Sevestre et ses amis opérèrent une diversion hardie qui semblait les mettre en contradiction avec eux-mêmes, mais qui préparait de loin leur revanche. Ils proposèrent d’inscrire parmi les motifs la communication clandestine de la pièce Canaille de D…, « regardée, en 1894, comme désignant Dreyfus ». Crépon, avec son ordinaire âpreté, appuya la motion.

La majorité entrevit seulement le piège, le dilemme qui résulterait de la mise en cause de Mercier et qui pèserait, à les écraser, sur les juges militaires. D’autre part, comment rejeter des considérants qui frappaient en plein l’illégalité, la forfaiture ? La proposition fut adoptée, malgré Ballot[1].

  1. Cass., III, 203, Ballot-Beaupré : « Quoique puisse indiquer l’enquête (au sujet de la communication secrète), nous n’avons pas le droit d’en tenir compte… Nous l’ignorons légalement… etc. » De même Manau : « Quelle que puisse être l’impression au sujet de cette irrégularité, n’ayant pas le droit de