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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/184

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Il le lui dit à lui-même[1], lui promit le concours « actif et direct » de ses amis radicaux. — Les uns l’avaient pressé de prendre le pouvoir ou d’y décider Brisson, qu’il alla voir, en effet, mais sans succès ; les autres préféraient le réserver, après la grosse besogne, pour des temps meilleurs. — Enfin Waldeck-Rousseau céda, parce que les principaux républicains lui faisaient de son acceptation un devoir civique[2], puisque les chefs des modérés avaient fait faillite, que ceux des radicaux se dérobaient et que Loubet allait être découvert, et quand il se sentit assez maître pour s’entourer seulement d’hommes qui recevraient sa direction sans arrière-pensée. C’était le moins, dans une telle tempête, qu’il ne prît la mer qu’avec un équipage de son choix. Ainsi, il avait arrêté de revenir au ministère de l’Intérieur qu’il avait occupé sous Gambetta et sous Ferry, de mettre Galliffet à la Guerre, non plus cette fois comme l’ad latus d’un civil, mais comme titulaire, de comprendre Millerand dans sa combinaison, et d’y faire entrer, sans autre préoccupation que du talent et du caractère, des hommes appartenant à toutes les fractions du parti républicain, parce que la Liberté était leur commun patrimoine et que, pour défendre la Révolution, tous les fils de la Révolution avaient droit à leur part du commun danger[3]. Il se rendit exactement compte que le choix de Millerand faisait plus que bouleverser la géographie politique que les radi-

  1. Waldeck-Rousseau insista pour que Bourgeois prit le pouvoir ; il lui dit qu’il accepterait un portefeuille quelconque dans son cabinet.
  2. Notamment les délégués des groupes républicains du Sénat et de la Chambre (à qui s’étaient joints Pelletan et De La Porte) firent une démarche pressante auprès de lui.
  3. Waldeck-Rousseau, la Défense républicaine. Introduction.