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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/32

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


l’omission du mot dans le texte nouveau provenait d’une erreur purement matérielle[1] ; et Guérin, au nom de la commission, sur le second, que les trois conseillers qui avaient été appelés à donner les premiers leurs avis « ne devaient point faire partie des Chambres qui statueraient sur le fond » ; « la pensée du législateur leur traçait ce devoir, et la disposition additionnelle était inutile et superflue ». Dupuy, interrogé à deux reprises, ayant refusé de dire autre chose sinon qu’il repoussait l’amendement (parce qu’il aurait fallu revenir devant la Chambre), Demôle, qui eût pu se contenter de la réponse de Guérin, réclama un vote et se fit battre[2]. Enfin, un autre amendement, qui était la sagesse même, fut également repoussé. Un sénateur du Doubs, Bernard, qui n’était pas juriste, mais seulement un homme de sens droit et simple, qui avait combattu la loi, mais qui avait pris au sérieux ce grand désir d’apaisement et d’en finir, proposa que les Chambres réunies fussent tenues de juger au fond et de casser sans renvoi : « C’est le complément nécessaire, la conséquence, logique et rigoureuse, du projet… Tel quel, le projet du gouvernement n’est pas une solution. En cas de revision, c’est le recommencement de l’affaire, le conflit possible (entre la plus haute juridiction, la Cour de cassation tout entière, et le premier tribunal venu, militaire ou civil) : et, dès lors, l’aggravation du malaise, de la crise. » Guérin, longuement, puis Lebret, s’opposèrent à la motion : « Vous voulez dessaisir les conseils de guerre ! » Bernard réunit 41 voix[3] ; 93 sénateurs s’abstinrent.

  1. Bernard (du Doubs), puis Girard demandèrent le rétablissement du mot ; l’amendement fut rejeté par 147 voix contre 125 (1er mars).
  2. Par 157 voix contre 117.
  3. Contre 160. — Deux anciens ministres de la justice. Demôle et Dubost, quelques-uns des meilleurs juristes du Sénat,