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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/224

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

Bien que la tentative de Dumas n’ait pas eu le succès pour lequel Mathieu l’avait désirée, elle l’ancra davantage dans sa conviction que le bordereau annoté avait été le grand argument secret de Mercier et de ses amis, non seulement à Rennes, mais depuis que Picquart avait quitté le bureau des Renseignements, et, peut-être même, comme c’était mon avis, depuis le premier procès de Dreyfus. Il avait laissé dire, depuis près de trois ans, qu’il se désintéressait de la revision, soit parce que la liberté suffisait à son frère, soit parce que « les instances judiciaires coûtaient trop cher », soit pour d’autres raisons non moins basses ; il avait eu pour lui sa conscience, l’estime et l’affection de ceux de ses compagnons de lutte qui ne s’étaient point égarés ou aigris au lendemain trouble de Rennes ; il avait senti chez son frère comme chez lui-même la résolution inflexible de reprendre l’offensive, dès qu’il y aurait quelque chance qu’elle menât à la victoire ; et tant de médisances et de vilenies, parfois intéressées, ne l’avaient atteint que dans ses illusions sur les hommes. À présent, il se croyait sûr de tenir un levier qui, bien manœuvré, soulèverait à nouveau l’opinion et la justice.

VII

Mathieu, à chacune des étapes de son voyage à la recherche du secret de Rennes, me confia ses espérances et ses découvertes ; il informa également d’autres amis, Trarieux, Clemenceau. Leblois étant venu le voir à Mulhouse, il lui apprit les derniers résultats de son en-