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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/333

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L’ENQUÊTE


ni Rochefort, ni Millevoye, ni les Pères de la Croix ou les gens de la Libre Parole n’ont inventé cette histoire. Elle leur est venue du ministère de la Guerre, de l’ancien État-Major, ou d’Henry, ou de Boisdeffre, ou de Mercier.

Les journalistes, mis en cause par Jaurès, se dérobèrent. Rochefort, si affirmatif, qui sommait Cuignet de le citer à son procès pour qu’il y attestât que « le bordereau ; écrit sur papier fort par l’officier félon, avait été annoté de sa propre main par l’Empereur allemand[1] », déclare « qu’il a recueilli cette information comme on recueille les informations ordinaires, sans les garantir pour cela » ; aussi bien « elle vient des amis de Dreyfus[2] ». Millevoye n’a vu aucun document (la photographie du bordereau annoté) ; le texte dont il a donné lecture dans une réunion publique[3] et qu’il a reproduit dans son journal, il le tient d’un personnage étranger qui n’est point de nationalité allemande et que « le secret professionnel » lui défend de nommer[4]. Papillaud, de la Libre Parole, refuse de déposer[5].

    l’Empereur d’Allemagne » (23 avril 1904) ; Weiss, de son beau-père, qui le savait d’un général, que « Mercier avait la photographie du bordereau annoté » (4 Juin 1904) ; Wyrouboff, du général Jourdy, que les juges de tiennes s’en étaient fréquemment entretenus. Wyrouboff m’avait fait le même récit ainsi qu’au général André. Il dit cependant à la Cour que ses souvenirs (en 1904) n’étaient plus assez précis « pour en faire la matière d’un témoignage ».

  1. Intransigeant du 24 décembre 1900. — Voir p. 147.
  2. Cour de cassation, 23 avril 1904.
  3. Voir t. III, 397. — Millevoye, dès 1896, avait fait allusion au bordereau annoté dans un article de la Patrie (5 décembre 1896).
  4. Cour de cassation, 23 avril 1904.
  5. Il allégua qu’il avait oublié de se munir d’un crucifix et qu’il ne pouvait pas prêter de serment laïque. Il fut condamné, séance tenante, à l’amende.