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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/392

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Dautriche, « d’avoir commis un faux en matière d’administration militaire » et, contre les trois autres, « d’avoir soustrait frauduleusement une somme d’environ 20.000 francs appartenant à l’État ».

Un tel rappel au Droit, à ce droit supérieur qui n’est pas toujours le droit écrit, frappa durement André. Et nulle riposte possible. Il aurait cassé Dessirier que l’ordre de mise en jugement n’en subsistait pas moins, désormais irrévocable.

Entamé bien qu’il fût manifestement insoutenable, abandonné parce que la condamnation était, de par la loi, impossible, repris parce que l’acquittement était certain, le procès n’offrait plus d’intérêt. Il occupa cependant dix audiences[1] où les accusés eurent beau jeu à opposer leur parole de soldats aux assertions des trois espions absents, Wessel en prison, Przyborowski en fuite, Mathilde « qui demandait de l’argent pour faire le voyage ». Le commissaire du gouvernement, Rabier, « étant donnée la moralité de cette personne », renonça à son témoignage[2], sur quoi il ne restait plus à Dautriche qu’à expliquer ses retouches, additions et grattages, ce qu’il fit de deux ou trois façons différentes, mais également obscures[3], et aux officiers qu’à excuser l’absence, puis la précision de leurs souvenirs. François, d’intelligence vive et prompte, toujours d’attaque, parole abondante et claire, le plus soldat des accusés et plus avocat que les avocats, trouva ceci, qu’il avait indiqué déjà dans sa lettre à Dautriche[4],

  1. 25 octobre au 7 novembre 1904.
  2. Procès Dautriche, 8, Rabier.
  3. Ibid., 15, le général Bertin, président : « Hier (à la première audience), vous n’avez pas dit la même chose, vous rejetiez toute responsabilité. » Réponse de Dautriche : « Je confondais, j’étais un peu troublé. »
  4. Voir p. 367.