Aller au contenu

Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/423

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
413
LA REVISION


de pressantes instances[1], de se prononcer contre le système des fiches, « abdiquant ainsi sa fonction moralisatrice[2] », j’adressai ma démission à Pressensé. Successeur de Trarieux à la présidence de la Ligue, il avait écrit de notre émotion « qu’elle faisait plus d’honneur à notre probité qu’à notre sens critique ». « Je sais, lui dis-je, qu’il est dangereux de refuser d’incliner sa conscience devant les sophismes des partis ; je sais aussi que ces sophismes sont éphémères, comme les intérêts qu’on croit ainsi défendre ne sont qu’apparents ; et que les partis, qui se détachent des principes d’où leur sont venues la force et la victoire, vont au devant des pires aventures[3]. » Je fus remplacé au Comité central, dont je faisais partie depuis le premier jour de la Ligue, par Anatole France, dont Mollin était alors le gendre.

La discussion reprit le 4 novembre, sur trois interpellations (Guyot de Villeneuve, Berteaux, Jaurès) ; la Chambre en ordonna la jonction.

André se tint en selle, mais douloureux à voir. Il a compris enfin, par le scandale, toute la laideur des notes secrètes, des procédés » d’investigation secrète empruntés à l’adversaire[4] », souffre de son nom éclaboussé et n’a point le courage du seul acte vraiment noble : avouer son tort.

Il plaida longuement, se couvrant de Waldeck-Rousseau, revendiquant pour le ministre de la Guerre « le droit et le devoir de s’informer de toutes parts ». Alors même qu’il eût été exact « que les qualités militaires

  1. De plusieurs présidents des sections de province, Bouglé, Louis Comte, Charles Rist, etc.
  2. Lettre de Bouglé.
  3. 19 et 20 décembre 1904. — Émile Bourgeois, professeur à la Sorbonne, donna sa démission pour le même motif.
  4. Clemenceau, Le Système des fiches secrètes, dans la Dépêche du 3 décembre 1904.