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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/437

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LA REVISION


auraient voulu que les associations religieuses épargnées, qu’elles fussent autorisées ou non, se déclarassent « solidaires de celles qui étaient frappées ». « Aux premiers scellés posés sur les portes des écoles », il eût fallu que les congrégations hospitalières répondissent en fermant leurs établissements, « crèches, asiles, hospices », jetassent à la rue, à la charge de Combes, « leurs malades et leurs orphelins », « prissent en masse le chemin de l’exil ». Et ils font appel au Pape, le conjurent, le somment d’intervenir, de lancer ses foudres, « de se montrer décidé à dénoncer lui-même le Concordat[1] ». Ces paroles sont entendues à Rome. En conséquence, Pie X, théologien étroit, avec l’instruction d’un curé de campagne, ignorant des choses françaises, même de la langue française, si bien que, pour cela, il n’avait point paru « papable »[2], menace, décrète, prétend révoquer des évêques, excommunie, comme si Rome avait été encore la maîtresse du monde, si la Réforme, l’Encyclopédie et la Révolution n’avaient point modifié quelque chose dans les esprits et si l’Europe, du jour de son élection, était retombée au Moyen Age. Dès lors, les faits, encore une fois, sont plus forts que les hommes, imposent non seulement à Combes, mais aux plus sages, aux plus prudents, une force plus grande d’action qu’ils ne s’étaient avisés de pré-

  1. Jules Delafosse, député du Calvados, dans le Gaulois du 26 juillet 1902.
  2. « Un des cardinaux français se trouva voisin d’un collègue étranger qu’il ne connaissait pas et avec lequel il engagea la conversation suivante : « Votre Éminence est sans doute archevêque en Italie ? Dans quel diocèse ? — Non parlo francese. — Non loqueris gallice ? Ergo non es papabilis, siquidem papa débet gallice loqui. — Verum est, Éminentissime domine. Non sum papabilis. Deo gratias. » (Cardinal Mathieu, Les Derniers Jours de Léon XIII et le Conclave, 71).