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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/58

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


tions qui aient été accomplies depuis la fondation de la République[1] » ; tous deux, mais surtout Méline, dénoncent l’Affaire comme l’origine du mal. « C’est grâce à l’Affaire, disent-ils, que le parti socialiste est parvenu à entrer au gouvernement » ; il n’exerce pas seulement son influence « sur le terrain social », mais encore, et non moins puissamment, « sur l’orientation politique du ministère ».

Millerand, pendant les vacances, avait pris plusieurs fois la parole, et précisément parce qu’il restait logique avec lui-même, avait rassuré et inquiété tour à tour les intérêts. Ainsi à Limoges, il a fortement dit aux ouvriers qu’ils ne peuvent attendre d’amélioration à leur sort « ni de mouvements tumultueux et violents, ni d’une panacée subite », que « le temps des miracles est passé » et « qu’on ne changera pas d’un coup de baguette le sort des malheureux[2] » ; mais, à Lille, quelques jours après, il a repris les affirmations de son discours de Saint-Mandé : « L’hypothèse collectiviste n’est pas seulement une hypothèse légitime et féconde ; elle est encore tous les jours vérifiée par les faits… », et il a rappelé l’objet constant de ses efforts : « Unifier le parti socialiste, le mener vers la conquête des pouvoirs publics[3]. »

Ce discours de Lille fut porté à la tribune par le député Motte, grand industriel de Roubaix ; Waldeck-Rousseau, l’année précédente, avait fort contribué à le faire élire contre Guesde, qui avait appelé Millerand à la rescousse. Motte, ayant donné lecture des déclarations de Millerand, leur opposa des discours de Waldeck-Rousseau, vieux à peine d’un an, sur le collectivisme

  1. Chambre des députés, séance du 16 novembre 1899.
  2. 1er octobre 1899.
  3. 15 octobre.