Aller au contenu

Page:Jourdain - Les Décorés, 1895.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
x
AU LECTEUR

Victor Hugo, mort simple officier de la Légion d’honneur, n’eût obtenu aucun grade s’il n’avait possédé, au moment des promotions, la toute-puissante amitié d’un politicien. — Le veinard !

Mes décorés verront-ils leur nomination ratifiée par le suffrage universel ? J’en doute. D’abord, mes promotions, passablement batailleuses, un tantinet frondeuses, ne plairont pas à tout le monde ; ensuite — comme le Molière d’Hervé entrant à la cour de Henri II — j’arriverai parfois trop tôt, et on n’aime guère les gens dont la montre avance. Je réclame, en tout cas, quelques semaines, quelques mois de crédit ; la popularité va vite en cette fin de siècle, et l’on n’attendra peut-être pas longtemps pour que nous tombions d’accord, le public et moi. D’ailleurs — me souffle M. de La Police — un quart d’heure avant d’être acclamé par la foule, un génie brille par son manque radical de notoriété.