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Page:Jourdain - Les Décorés, 1895.djvu/267

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ODILON REDON

œuvre, imprégnée de grandeur terrifiante et de symbolisme troublant, discuter le succès à Déjà passé ou à Seuls enfin ! dans les vitrines des industriels.

Si le public reste indifférent, les artistes (?) se montrent agressifs. Exaspérés de voir un homme faire de l’art uniquement pour le bonheur de produire, indemne de toute préoccupation pécuniaire, esclave de son propre idéal, ils polluent cette figure sereine du plus abominable outrage. « Odilon Redon — déclarent-ils négligemment — n’a aucune conviction, et son étrangeté ne formule, au fond, qu’un bas cabotinage. »

Ces plaisantins se trompent sciemment.

On ne risque pas toute une carrière, on ne renonce pas, volontairement, à sa part de fortune et de gloire pour la douteuse satisfaction de se mentir à soi-même et de poser devant une galerie qui vous couvre de huées. L’audacieux poète qui a essayé de matérialiser l’irréel, de corporiser le rêve, de formuler l’impos-