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Page:Journal de Gouverneur Morris.djvu/290

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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS.

était en notre pouvoir. Je ne crois pas que lui l’ait fait. J’envoie sous enveloppe blanche 500 francs à Mlle Duplessis, avec toutes sortes de précautions pour éviter d’être découvert ; sa pension est arrêtée et elle ne sait plus que faire. Pauvre fille, elle emploie ses jours et ses nuits à pleurer. Je passe la soirée chez Mme de Guibert. Après souper, je suis un peu aimable. Au moment de partir, j’ai une curieuse conversation avec lady Anne Lindsay qui est désespérément amoureuse de M. Windham, et que la jalousie dévore. Je lui dis que lorsqu’on désire ramener un amoureux, il faut alarmer ses craintes, et que si elle veut se servir de moi, je suis à ses ordres. Je lui dis comment elle devrait agir, et elle répond qu’en cas de nécessité, elle aura recours à moi.


18 octobre. — Ce matin, aussitôt après le déjeuner, je m’habille et vais chez le comte de Moustier. Il semble très content de me voir, et nous parlons de la situation des affaires. Il semble disposé à accepter la charge des Affaires étrangères. Nous allons ensemble dans ma voiture jusque chez le comte de Ségur, où il prend la sienne, et en chemin je lui soumets le moyen de changer la Constitution française, et de faire en même temps une acquisition considérable de territoire. Il se montre attaché aux intérêts de la Prusse. Je fais une longue visite au comte de Ségur. Il est plongé dans l’intrigue jusqu’aux yeux, tout en se déclarant déterminé à rester tranquille. Il est fort possible toutefois qu’il dise la vérité, car l’homme se trompe beaucoup plus souvent qu’il ne trompe les autres. Après le dîner, je fais une visite à M. de Montmorin, et je le trouve fort agité. Après être restés quelque temps dans le salon, nous nous retirons ensemble, et il me donne enfin le discours que j’avais préparé pour le roi. Il me dit alors que son cœur déborde et qu’il doit le soulager ; que depuis le départ de La Marck, il n’a plus que moi à qui se fier. Il