Aller au contenu

Page:Journal de Gouverneur Morris.djvu/345

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
327
JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS.

point digne de fixer leur attention, c’est que tout arrangement fait par moi avec eux serait entaché de nullité, puisque je n’avais pas le pouvoir de traiter avec le gouvernement actuel. M. Clavière prétend que la conduite des États-Unis envers le gouvernement actuel différerait certainement de celle des monarques européens, et me demande péremptoirement si je veux, ou non, signer le contrat. Son langage et ses manières étaient naturellement de nature à produire chez moi une certaine indignation, et bien que disposé à pardonner beaucoup à un homme que sa vie d’agioteur n’avait pas beaucoup préparé à un poste où la délicatesse des manières et des expressions est presque essentielle, je ne pouvais personnellement me soumettre à une insulte faite au pays que je représente. Je répondis donc que je ne comprenais pas ce qu’il voulait dire. Ma figure, je crois, exprima ce que je ne disais pas ; il fut amené à dire, en guise d’explication, qu’il était nécessaire au gouvernement d’avoir un engagement positif, car autrement il faudrait assurer le service par d’autres moyens, et il exprima de nouveau sa conviction que les États-Unis reconnaîtraient le nouveau gouvernement. Je répondis qu’il n’était pas convenable que moi, un serviteur, je prétendisse décider quelle serait l’opinion de mes maîtres, que j’attendrais leurs ordres pour m’y conformer quand je les aurais reçus, et qu’il m’était impossible de prendre sur moi de préjuger des questions d’une telle importance. J’ajoutai que j’écrirais pour recommander chaudement l’affaire aux ministres des États-Unis. Mais ce n’est pas ce qu’ils voulaient. Clavière est très fâché. J’ai du monde à diner. L’ambassadeur de Hollande me dit qu’il a reçu ses ordres et qu’il demandera ses passeports demain. Le soir arrivent chez moi un certain nombre de personnes avec un ordre de rechercher les armes que l’on prétend y savoir cachées. Je leur dis qu’ils ne feront pas de recherches, qu’il n’y a pas d’armes, et que, même y en eût-il, ils n’y toucheraient pas. Je réclame