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Page:Jouvet - Réflexions du comédien, 1938.djvu/113

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J’arrête ici ces citations, aussi fastidieuses que naïves, et qui nous permettront de comprendre, maintenant, comment M. Arnaoutovitch a pu produire 1 500 pages sur l’œuvre de Becque, mais dont la lecture, à la longue, finit par ajouter à ce sentiment de pénible disgrâce qui éclaire toute l’œuvre et la vie de l’auteur de la Parisienne.

Ces trois gros volumes ne font que délayer une accablante médiocrité et les sincères efforts de M. Arnaoutovitch, plongeant le lecteur dans des abîmes de consternation, sont, en vérité, pour Henry Becque, il n’y a pas d’autre mot, une nouvelle catastrophe.

Si j’ai aussi longuement insisté sur cette particulière et si constante malédiction, sur cette affreuse tristesse qui semblent peser sur le nom d’Henry Becque, c’est qu’elle me semble aussi expliquer son œuvre, qu’elle en donne le sens et la saveur véritables.

Comme nous nous représentons Homère aveugle et sans toit, Dante banni dans l’enfer de la rancune, Villon sous le gibet, Le Tasse dément et prisonnier, Camoens naufragé, Cervantès infirme et pauvre, Racine disgracié, Corneille en savates, Beethoven sourd ou André Chénier sur la guillotine, de même, la postérité devra se représenter, médiocre et dénué, et amer et maudit, l’auteur de la Parisienne.

Il y a une phrase que Péguy disait quelquefois et