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Page:Jouvet - Réflexions du comédien, 1938.djvu/129

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mari, il lui faut un amant ; Fromont est là, sous sa main, ce sera lui. Nous voyons alors Sydonie satisfaite et triomphante, partagée entre deux hommes qu’elle subjugue également : l’un le mari soumis et aveugle ; l’autre, l’amant borné et dompté.

« Cette situation serait bien périlleuse pour une autre que pour elle. Sydonie la sauve par son audace même ; l’audace, en pareil cas, c’est la prudence. »

Pour définir cette pièce roide comme on disait à l’époque, Copeau me permettra de lui emprunter sa définition lapidaire du Misanthrope : « C’est un monsieur qui veut parler à une dame et qui n’y arrive pas. »

Le monsieur, c’est Lafont, homme incolore et dépourvu de toutes les grâces de l’amant. La dame, c’est une manière de Bovary parisienne.

Il est inutile, je crois, d’insister sur le choix maladroit du titre. Arthur a dû le souffler à Becque. On a assez dit que ce n’était pas la Parisienne.

Clotilde, c’est la coquette : un des thèmes éternels du théâtre. C’est Célimène, mais Célimène vue à l’époque d’Émile Zola. Becque, pour compléter le triangle, a imaginé un pauvre mari, dépourvu de toutes les grâces du mari, et même de celles du cocu.

Je m’en voudrais d’insister sur ces personnages sordides.

Mais, où est le miracle, c’est que cet homme, qui a été faussé par son époque, qui n’a aucune grâce, aucun lyrisme, qui nous propose des personnages écœurants, ait tout de même su nous intéresser.