Aller au contenu

Page:Jouvet - Réflexions du comédien, 1938.djvu/211

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui fait de l’art dramatique un genre littéraire au premier chef ; celui qui donne l’importance au texte et n’admet que par surcroît et comme complément les éléments spectaculaires.

Le théâtre littéraire, ce sont les tragiques grecs Eschyle, Sophocle, Euripide, Sénèque ; l’humanisme renaissant avec Shakespeare ; le classique avec Corneille, Racine, Molière ; puis Marivaux, Beaumarchais, Musset ; ces cimes de l’art dramatique qu’un de nos metteurs en scène a définies un jour, dans un mouvement d’irritation, sans doute : « Les gens de lettres qui écrivent pour le théâtre ».

Il y a des œuvres durables et d’autres saisonnières. La mode préside toujours à leur écriture et à leur conception ; mais, lorsqu’elles atteignent une généralisation où seul l’humain est en question, ce sont des œuvres classiques.

La mise en scène est ici interne, c’est-à-dire que le travail du metteur en scène sera de surveiller la façon dont la pièce se comporte par rapport à ses suggestions et d’incorporer à l’œuvre ses inventions sans qu’elle en soit altérée ou déformée.

Dans le théâtre spectaculaire, au contraire, la mise en scène est externe : les inventions, les apports, baignent l’œuvre. Le texte n’est plus, ici, qu’un prétexte ou un support à l’acteur, aux jeux de scène, aux décors et le metteur en scène, empruntant surtout au magasin d’accessoires du théâtre, ou à celui de son imagination, rivalise souvent avec le conducteur de cotillon.