Aller au contenu

Page:Jouvet - Réflexions du comédien, 1938.djvu/28

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des comédiens par les allées de la salle, les innovations dénommées « scènes dans la salle » où l’on voit soudain de pseudo-spectateurs se lever et participer au jeu des acteurs, que ce soient les dispositifs scéniques inventés en Russie ou en Amérique, dans lesquels le public cerne à nouveau de curieuses et étranges surfaces destinées à la représentation, que ce soient les tentatives de décoration de la salle qui veut participer à l’action, et où le décorateur s’évadant de la scène, amplifie son rôle, on constate tous les jours, à notre époque, sous une forme ou sous une autre, le désir de l’homme de théâtre de se pousser vers le public, de regagner par tous les moyens cette intimité d’autrefois, dont la nécessité est une des lois de l’art dramatique. Intimité faite de la pénétration de deux éléments, le public et la représentation, dont le pouvoir d’aimantation est, comme en physique, en rapport inverse de la distance.

Les premiers dispositifs, les premières traces qu’ont laissées les assemblées dramatiques en Grèce, nous montrent le public encerclant un espace dans lequel un tonneau ou un tremplin sert de scène à l’action : c’est la forme du cirque et celle du théâtre antique. Ce dispositif naturel prend des aspects différents suivant l’époque et évolue comme le noyau dans le protoplasme de la cellule, mais la question est dans le contact du public, dans son amorçage, dans cette espèce d’osmose du fluide dramatique.

En dépit de tout ce que cette affirmation peut avoir de révoltant ou d’affligeant, il n’y a, au théâtre, qu’un