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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/167

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VISIONS DE L’INDE

gnées et d’ailleurs courageuses. Ces âmes d’insulaires sont si différentes de nous Latins, profondes, tenaces, naïves et intéressées à la fois, s’immolant volontiers à un idéal collectif, au bien-être de la famille, à la grandeur de la race. Nous les comprenons de moins en moins, nous autres individualistes acharnés, nous que tout divise. Je regarde les yeux doux et patients de ce bourgeois typique, sa moustache qui grisonne. Il a vieilli loin de l’Angleterre qui est pour lui le plus beau pays du monde, et peut-être mourra-t-il à la peine, dans ces montagnes, dont il ne sent nullement la poésie et qui sont pour lui un laborieux exil. Qu’importe ! il doit faire les siens riches et heureux. À ce but, il se sacrifie entièrement.

Il faut lutter contre le mauvais vouloir des natifs, leur duplicité. L’hiver est dur. Quand il vient, les neiges s’accumulent, la montagne tremble, l’hôtel oscille dans le déplacement des rocs, les fauves descendent. La bonne saison est courte. Il faut payer très cher le cuisinier français qu’exige la clientèle…

— Ah ! continue-t-il, vous ne vous amuserez pas beaucoup ce mois-ci, il faut que la société soit arrivée pour que le pays devienne gai… (cet hôtelier pense comme presque tous les Anglais ; l’Inde à leurs yeux ne renferme pas d’autre intérêt

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