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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/268

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VISIONS DE L’INDE

race, amoureux : jusqu’à la volupté, emphatique jusqu’à la démence, gracieux comme une femme, téméraire comme les premiers guerriers aryens, familier avec les animaux et avec les autres dieux, pratiquant la morale élargie du Bouddha dont il retient les qualités d’apparat et dont il répudie la passivité nihiliste, conquérant comme Mahomet, et, à l’image du Christ naissant et mourant comme un Messie.

Son corps est « bleu » à l’instar du ciel dont il descend, et son nom de « Chrisna » veut dire, étymologiquement, l’acteur suprême, l’éternel agissant. À l’Apollon antique, il prit l’amour de la beauté et de la danse, le goût du rythme ; il tient d’Hercule la victoire sur les monstres ; il rappelle aussi notre Saint-Georges, exterminateur du dragon. Mais ce qui le spécifie à jamais, ce qui en fait une figure personnelle et vivante, c’est son érotisme infatigable, le perpétuel baiser qui fleurit sur sa bouche éloquente, le spasme qu’il incarne, cette ivresse à la fois spirituelle et charnelle dont seul le Dionysos des mystères helléniques nous évoque l’image préparatoire et comme l’annonciation.