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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/321

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VISIONS DE L’INDE

comparable. Se l’ai répété maintes fois en ce livre, Yoghis, Mahatmas, Sanyasins ne sont plus aujourd’hui que la contrefaçon de ces antiques initiateurs de rois, de législateurs et de prêtres. La sève mystique épuisée, ce grand organisme a vu se flétrir ses bras guerriers, se dessécher sa tête savante, tomber sa vigueur physique en même temps que son rayonnement intellectuel et moral.

Aujourd’hui encore, un vestige demeure de cette antique suprématie. Le mendiant sacré, qui a tout dépouillé pour vivre cette vie panthéistique, (notre saint François a christianisé en le réglant ce magnifique délire) est encore salué par les rajahs et les brahmanes comme un supérieur. Ce pauvre reçoit l’hommage prosterné des riches de l’intelligence, des privilégiés de la fortune et du pouvoir. Au-dessus des trônes, au-dessus des palais et des pagodes, au-dessus des universités et des camps, les peuples, les savants et les princes vénèrent la cabane de l’yoghi, la peau de panthère où le sanyasi s’accroupit pour méditer ; et la cendre, dont le disciple nu de Shiva se revêt par mépris des illusoires splendeurs, est recueillie par les mains pieuses avec plus d’honneur que toutes les pierres de Golconde et les perles de Ceylan…

L’Islam guerrier, luxuriant et brutal, n’a pu étouffer cette obstinée imploration d’un bien supé-