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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/375

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VISIONS DE L’INDE

roupies qu’ils mettaient aux pieds du colonel. Celui-ci, un vaillant officier et un gentilhomme, devant moi Français, sembla rougir tout de même d’accepter de ces sauvages, pareils à des enfants, des sommes lentement et peut-être péniblement amassées. Mais les devoirs de l’administrateur l’emportèrent sur les scrupules de l’officier, et les roupies furent acceptées.

N’empêche que ces cavaliers des déserts de Jamrud et du Khyber-Pass ont mine altière, le turban posé en arrière du front, la face blanche, le geste à la fois galant et guerrier !

Je suis un des rares Français que la passion de l’inconnu, le goût de l’aventure entraînèrent jusque vers l’Afghanistan. J’ai pénétré dans ce fameux Khyber-Pass, le défilé inexpugnable qui protège l’Inde Anglaise. Par là se précipitèrent tous les envahisseurs, avides des riches territoires du Sud. Là, sans doute, éclatera la plus formidable conflagration de l’avenir, celle qui mettra aux prises l’ours russe et le lion britannique. Les Anglais s’y attendent ; aussi ont-ils, avec le sens pratique le plus sûr, gagné à leur cause et acheté les Émirs de l’Afghanistan par une pension annuelle, assez importante, puisqu’elle atteint dix millions de francs. De plus, ils leur envoient des armes ; et ce petit peuple, agglomération de tribus guerrières et féroces, est devenu un

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