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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/420

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VISIONS DE L’INDE

jeune homme de Manchester qui court volontiers le monde pourvu qu’il rejoigne sa famille à Christmas, il convient de décrire le « jeune Français qui ne peut se passer de sa mère » ; c’est un exemplaire très représentatif des latins en promenade mondiale.

Celui-là part avec un beau sourire, fier de se sentir libre et homme, enfin.

Mais, à peine Notre-Dame de la Garde a-t-elle disparu de l’horizon provençal, que déjà il souffre de tout son être déraciné. Sur le bateau des Messageries qui l’emporte, il cherche un compagnon possible. Si c’est une femme, il ne la quitte plus. Il place auprès d’elle son fauteuil de bord ; si elle se lève, il la suit pour faire sur le pont la promenade paresseuse qui dégourdit les jambes, mais laisse encore prisonnier. Au fond, il bénit cette petite cité voguante où il se sent en famille et gardé.

Le « jeune homme qui ne peut se passer de sa mère » est généralement riche et oisif ; seul enfant mâle, s’il a une sœur, elle a été pour lui une seconde mère encore. Son père, commerçant ou soldat, possède une énergie héréditaire, presque toujours soumise à l’influence de sa femme ; mais sa vieillesse vigoureuse rappelle une autre époque ; et il est, même aujourd’hui, apte à la lutte et au joyeux effort.