Aller au contenu

Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/57

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
43
VISIONS DE L’INDE

rendormie et l’ombrageux Rama qui la cherche reconnaît avec colère à côté d’elle le portrait du ravisseur. « Les envieux auraient donc raison ; même aujourd’hui, elle n’a pas oublié le monstre ! » Le mari irrité donne à Sita l’ordre d’aller rendre visite dans la forêt aux filles de l’ermite. Pauvre héros ! le voilà qui se repent même de ses victoires et qu’il pleure sur les vaillants qui ont succombé pour l’aider à délivrer cette infidèle ! Lakshmana, son frère consanguin, accompagnera la Reine jusqu’en la jungle où il la bannit. Lakshmana a beau s’indigner et supplier, Rama est impitoyable. Il faut remarquer ce détail charmant et d’une observation vraiment humaine : aucun personnage du drame ne doute un instant de la vertu de Sita ; seul. Rama son époux, celui qu’elle aime et qui l’aime, l’imagine criminelle. Et cependant Rama est le meilleur des hommes ; que dis-je ? d’après la mythologie hindoue, il est une incarnation de Vishnou. C’est que l’amour illusionne et rend injustes les hommes et les dieux.

L’acte suivant est comme baigné de larmes. Il se passe alternativement sur l’une et l’autre rive du fleuve Saragon. Les hommes n’ont pas averti Sita, mais son cœur est inquiet, son intuition écoute les fâcheux présages que lui apportent la nature et le crépuscule. Il n’y a pas jusqu’à Sumantra, le fidèle