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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/70

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VISIONS DE L’INDE

nous avons des castes de chanteuses et de danseuses ; elles se marient à des arbres, — oui, des arbres, — en des cérémonies touchantes qui datent des temps védiques ; nos prêtres les bénissent et en reçoivent beaucoup d’argent. Elles ne se refusent point à ceux qui les aiment et qui leur ont plu. Les rois les ont rendues riches. Elles représentent tous les arts et sont la beauté visible de l’univers. »

Nous décidâmes d’excursionner dans les bazars ténébreux de la ville aux nuits terribles, pour vérifier ses plaies. Le brahmane nous laissa, impatient sans doute de se purifier chez lui de notre contact. Nous quittâmes Durumtollah pour plonger dans les cycles d’un enfer à nuit épaisse. Là, des paquets de maisons conspiratrices, dont l’odeur seule est un poison. De distance en distance, des policiers nous souriaient, protecteurs. Enfin, nous débouchâmes dans une rue plus lumineuse. Des femmes saoules se pendaient aux portes. Celles qui viennent du Népaul avaient un visage pâle et doux, aux sourcils longs, au nez court, et un corps d’enfant ; on reconnaissait les filles de Burma à leurs pommettes saillantes. Dans cette cosmopolis de la prostitution se mêlaient des Chinoises, des femmes de Bombay, de Madras et de Ceylan. Des Japonaises aux robes bariolées, à la coiffure transpercée de