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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/75

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VISIONS DE L’INDE

« Regarde, » dit-il. Je regarde tout autour et je vois sur les murs, au-dessus des lits, de maladroites peintures hindo-japonaises où un artiste sadique et naïf a peint des supplices inouïs. Une sorte de déesse Kali dirige les horreurs érotiques et sanglantes qui s’exercent sur un blanc, un Européen reconnaissable à son costume anglais et à ses favoris qui sont restés dans l’Inde le signe traditionnel de l’adversaire. La déesse, en qui le peintre incarna une prostituée vengeresse, caresse avec des dents qui coupent et des mains qui arrachent. La tête européenne pend, fauchée, avec encore la grimace du spasme ; le ventre est une plaie qui baie, d’où la chair mangée a disparu ; des bras manquent ; des genoux pliés à rebours éclatent ; un pal savant vrille le corps, fouille comme un poignard amoureux et enragé. C’est un vestige de la guerre des cipayes transposé dans la sexualité indigène, la revanche de la femelle hostilité contre le « melech[1] » qui paie et salit. Nous avons ici touché la prostitution proche du crime, celle qui assassine, — qui châtie.

  1. Cette insulte — melech, impur, — est universellement adressée au chrétien par l’Asiatique bouddhiste ou hindouiste.
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