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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/346

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des congrégations, des confréries, des ligues, etc., qui peuvent couvrir un tout autre but et être contraires à la religion même dont elles ont pris le masque… La communauté du culte résulte, non de l’association ou du choix des personnes, mais de l’identité des croyances ; ce n’est pas par forme d’association que les coreligionnaires se réunissent, c’est par identité des croyances[1]. » M. Dupin disait devant la même Cour, dans le procès du pasteur Oster (20 mai 1846) : « Quant au gouvernement, il doit égale protection à chaque culte ; c’est pour lui un devoir absolu. Ce droit et ce devoir sont incompatibles avec l’autorisation préalable exigée par l’article 291. » Lors de la discussion de la loi de 1834, M. Dubois (de la Loire-Inférieure), esprit à la fois très-élevé et très-pratique, proposa un amendement pour distinguer nettement le droit d’association et le droit de réunion. Son amendement fut rejeté, ainsi qu’une proposition analogue de M. Roger (du Loiret), après ces paroles du garde des sceaux, qui le déclarait inutile : « Voilà la grande distinction à faire, dit le ministre : s’agit-il de réunions qui ont seulement pour but le culte à rendre à la Divinité et l’exercice de ce culte, la loi n’est pas applicable, nous le déclarons de la manière la plus formelle ; mais s’agit-il d’associations, qui auraient pour objet ou pour prétexte les principes religieux, la loi leur est applicable. » Le rapporteur de la loi à la Chambre des pairs répéta la même doctrine : « Si cette déclaration n’est pas dans la loi elle-même, dit-il, elle en forme du moins le commentaire officiel et inséparable. C’est sous sa foi que l’article a été voté par l’autre Chambre et qu’il pourra l’être par vous ; et il n’est pas à craindre qu’un tribunal, en France, refuse de l’entendre ainsi[2]. » Cependant, malgré ces prévisions, malgré les déclara-

  1. Dalloz, année 1836, t. I, p. 223.
  2. Consultez le plaidoyer de M. Jules de Laborde, avocat à la Cour de cassation, dans l’affaire de Montargis, 12 avril 1838 ; p. 32, 33 et 39.