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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/363

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l’État parfaitement libre de tout engagement à l’égard du clergé catholique et des ministres de la confession d’Augsbourg, dont les propriétés ont été aussi réunies au domaine public en 1799[1]. Il reste une chose évidente : c’est que le jour où l’État supprime les budgets, il donne le droit à chaque Église de rétribuer directement ses ministres[2].

On pourrait même dire qu’il leur en impose le devoir, car il est d’un intérêt général que l’exercice des différents cultes se fasse avec décence et dignité. Or, ce ne sera pas une chose facile en France que de remplacer un budget régulier[3] par une contribution volontaire. Je ne pense

    reslitulione, déclarat cos qui bona Ecclesiœ acquisiverunt molestiam nullam habituros neque a se neque a Romanis pontificibus successoribus suis. » (Théologie morale, par le cardinal Gousset, t. I, p. 466.) Il peut être utile de rapprocher de cette opinion le passage suivant du discours de Portalis, prononcé devant le Corps législatif le 16 germinal an X, et qui peut passer pour le meilleur commentaire du concordai de 1801 :
     « Le temporel des États étant entièrement étranger au ministère du pontife de Rome, comme à celui des autres pontifes, l’intervention du pape n’était certainement pas requise pour consolider et affermir la propriété des acquéreurs des biens ecclésiastiques. Les ministres d’une religion qui n’est que l’éducation de l’homme pour une autre vie n’ont point à s’immiscer dans les affaires de celle-ci. Mais il a été utile que la voix du chef de l’Église, qui n’a point à promulguer des lois dans la société, pût retentir doucement dans les consciences, et y apaiser des craintes ou des inquiétudes que la loi n’a pas toujours le pouvoir de calmer. C’est ce qui explique la clause par laquelle le pape, dans sa convention avec le gouvernement, reconnaît les acquéreurs des biens du clergé comme les propriétaires incommutables de ces biens. »

  1. Conseil des Anciens, séance du 11 ventôse an VII (1er mars 1799). Adoption du projet de Couturier sur l’aliénation des biens du culte protestant.
  2. « Justum est ut qui altari servit, de altari vivat, juxta illud Apostoli : Quis militat suis stipendiis unquam ? Fortene divites qui reipublicæ deservientes stipendia babenl, injuste accipiunt ?  » S. Alphonse de Liguori, liv. III, no 491.
  3. Le budget des cultes était, en 1849, de 40 746 493 francs ; en 1858, de 46 103 436 francs, en 1859 de 46 333 736 francs, il s’élève pour 1867 à 45 911 960 francs, plus 1 943 236 francs pour les cultes non catholiques. Le produit des oblations est certainement égal à ce budget. C’est donc une somme de 100 millions, au moins, qu’il s’agirait d’obtenir chaque année de la bonne volonté des familles catholiques en France.