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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/375

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de scandale disparaîtraient, si l’on était logique. Vous croyez à la religion ? Pratiquez-la. Vous n’y croyez pas ? Abstenez-vous dans la vie et dans la mort. Voilà le vrai ; mais il en est tout autrement dans la pratique.

4. Il y a, dans les rapports ordinaires de la vie, une autre source de conflits plus nombreux peut-être entre la discipline ecclésiastique et la loi civile ; c’est la propriété. La loi française a pris des précautions multipliées pour empêcher le clergé d’augmenter indéfiniment ses richesses. Avant la Révolution, le clergé possédait des biens immenses, parce que les donations faites aux églises, aux communautés religieuses, aux établissements charitables, et les fondations de messes ou d’offices étant considérées comme œuvres propitiatoires, les mourants ne se faisaient pas faute de se réconcilier avec le ciel au détriment de leurs héritiers. Non-seulement il en résultait de graves perturbations dans la paix et la sécurité des familles, mais l’État tout entier avait à souffrir de l’existence des propriétés de mainmorte. Il y perdait de deux façons ; d’abord par l’exonération des impôts, et surtout de l’impôt de transmission, les propriétaires mainmortables ne mourant jamais ; et ensuite par la mauvaise administration des immeubles, l’intérêt des bénéficiers étant de tirer immédiatement de la terre tout ce qu’elle pouvait donner, de l’épuiser par conséquent, et de la transmettre ainsi dévastée et inféconde à leurs successeurs étrangers et inconnus. La Révolution de 1789 coupa court à cet état de choses en mettant la main sur les propriétés du clergé, qu’elle indemnisa par la création du budget des cultes. La tâche des rédacteurs du Code civil fut d’empêcher le clergé de recommencer cette fortune. Ils firent pour cela l’article 909 qui déclare caduque toute disposition faite par un mourant au profit du directeur de sa conscience ; et l’article 910 qui interdit à tout établissement public d’accepter un legs ou une donation entre-vifs sans y être autorisé par ordonnance du pouvoir exécutif. Cette dernière disposition fut confirmée et même