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Page:Kann - Journal d'un correspondant de guerre en Extrême-Orient.djvu/13

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en courant un coolie armé d’un trousseau de sonnettes ; il distribue à tous les passants qu’il rencontre une dépêche que le Kobé Herald vient de recevoir et s’est hâté d’imprimer sur de petits carrés de papier que les Japonais appellent gogaï. Le portier apparaît bientôt dans la salle et donne aux assistants les feuilles encore humides.

La population anglo-saxonne de l’hôtel, réunie là pour le thé, pousse trois hurras qui font trembler les vitres : Port-Arthur est pris. La nouvelle est stupéfiante, car aucune armée japonaise n’a pu encore débarquer dans la péninsule de Liaotoung. Je ramasse le supplément pour lire le texte de la dépêche. Ce n’est pas un télégramme officiel. On annonce simplement de Tchéfou qu’un navire affrété par un journal de Londres s’est approché à quelques milles de la ville. N’ayant vu aucun mouvement en dehors du port, il en conclut que les Russes ont abandonné la place. Cette information ridicule a néanmoins trouvé créance auprès du public trop bien disposé qui m’entoure. Sa joie est si amusante que je me laisse persuader à rester jusqu’au soir pour assister à la procession triomphale que la population va organiser après le coucher du soleil.

Au dehors, la rue s’est en effet transformée comme par magie. Le magicien n’est d’ailleurs autre que le chef de police. Il a donné l’ordre de pavoiser : les