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Page:Kann - Journal d'un correspondant de guerre en Extrême-Orient.djvu/331

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» — Il n’y a pas de mais, cela suffit. »

Le 2 septembre, les notables voulaient encore réclamer des laissez-passer, mais c’était trop tard. Les batteries de la 5e division japonaise, ayant aperçu les officiers russes sur le haut de l’enceinte, dirigèrent leurs projectiles de ce côté. Les coups longs tombèrent dans la ville avec le résultat que l’on connaît.

Ce fut d’ailleurs un bombardement très comme il faut : les obus de 75 millimètres faisaient de petits trous discrets dans les toits et les murs, et tuaient les gens sans détruire tout le mobilier, comme autrefois les grosses bombes inélégantes des anciens canons.

Le marchand me raconta encore comment un espion japonais vivait à Liaoyang depuis le début de la guerre, déguisé en Chinois. Il se démasqua dès l’arrivée des vainqueurs et courut faire son rapport aux autorités nipponnes. Ce Fouquier-Tinville à peau jaune a dénoncé tous les indigènes soupçonnés d’avoir rendu des services aux Russes ; il a probablement aussi, par la même occasion, vengé quelques rancunes personnelles. Les musulmans, fort nombreux ici, sont particulièrement suspects, notamment le taotaï, qui appartient à cette religion et dont l’emploi et la tête ne tiennent plus qu’à un fil.

Le malheureux négociant, las de raconter, recommença à geindre en contemplant un fleuve de pétrole