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Page:Kant-Critique de la raison pratique, trad. Barni, 1848.djvu/124

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DE LA MÉTAPHYSIQUE DES MŒURS


liable avec une autre idée suffisamment établie, nous jette pourtant en des difficultés qui embarrassent très fort la raison théorique. Mais ce devoir est seulement celui de la philosophie spéculative, qui doit ouvrir par là un libre chemin à la philosophie pratique. Il n’est donc pas indifférent pour le philosophe de lever ou de négliger cette apparente contradiction ; car, dans ce dernier cas, la théorie laisse ici un bonum vacans, dont le fataliste a le droit de s’emparer, et d’où il peut chasser toute morale, comme d’une propriété qu’elle possède sans titre.

Cependant on ne peut pas dire encore que nous soyons arrivés ici aux limites de la philosophie pratique. En effet celle-ci ne doit pas figurer dans ce débat ; elle demande seulement à la raison spéculative de mettre fin à ce différend, où elle se voit elle-même embarrassée par des questions théoriques, afin de n’avoir plus rien à redouter des attaques extérieures, qui pourraient lui disputer le terrain sur lequel elle veut s’établir.

Mais le droit que s’attribue légitimement tout homme, même le plus vulgaire, de prétendre à la liberté de la volonté, se fonde sur la conscience et sur la supposition non contestée de l’indépendance de la raison par rapport aux causes purement subjectives de détermination, qui ensemble constituent ce qui appartient à la pure sensation, ou ce qu’on désigne sous le nom général de sensibilité. L’homme, qui se considère ainsi comme une intelligence douée de volonté, et, par conséquent, de causalité, se place par là dans un tout autre ordre de choses, et se met en rapport avec des principes de déter-