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Page:Kant-Critique de la raison pratique, trad. Barni, 1848.djvu/232

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DU CONCEPT D’UN OBJET DE LA R. PURE PRATIQUE.

il le faudrait toujours chercher en dehors de la volonté, dans la sensation. Que s’il fallait distinguer celle-ci, en tant que sensation agréable, du concept du bien, il n’y aurait nulle part rien d’immédiatement bon, mais le bien ne devrait être cherché que dans les moyens qui peuvent procurer quelque autre chose, c’est-à-dire quelque chose d’agréable.

Cette vieille formule des écoles : Nihil appetimus nisi sub ratione boni ; nihil aversamur nisi sub ratione mali, est souvent employée d’une manière très-exacte, mais souvent aussi d’une manière très-funeste à la philosophie, car les expressions bonum et malum contiennent une équivoque, qui vient de la pauvreté du langage : elles sont susceptibles d’un double sens et par là jettent inévitablement de l’ambiguité dans les lois pratiques, et obligent la philosophie, qui, en les employant, aperçoit bien la différence des concepts exprimés par le même mot, mais ne peut trouver d’expressions particulières pour les rendre, à des distinctions subtiles, sur lesquelles on peut ensuite ne pas s’entendre, le caractère propre de chaque concept n’étant pas immédiatement désigné par quelque expression propre[1].

  1. En outre l’expression sub ratione boni est aussi susceptible d’un double sens, car elle peut signifier que nous nous représentons une chose comme bonne, lorsque et parce que nous la désirons (la voulons), mais aussi que nous désirons une chose, parce que nous nous la représentons comme bonne, le désir étant, dans le premier cas, la cause qui nous fait concevoir l’objet comme un bien, et le concept du bien étant, dans le second, la cause déterminante du désir (de la volonté) ; et alors l’expression sub ratione boni signifierait, dans le premier cas, que nous