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Page:Kant-Critique de la raison pratique, trad. Barni, 1848.djvu/332

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DU CONCEPT DU SOUVERAIN BIEN.


haiter d’être délivrées de ce joug et de n’être soumises qu’à la loi de la raison.

On peut comprendre par là comment la conscience de cette faculté d’une raison pure pratique peut produire par le fait (par la vertu) la conscience de notre empire sur nos penchants, et, par conséquent, de notre indépendance à leur égard, et partant aussi à l’égard du mécontentement qui les accompagne toujours, et par là attacher à notre état une satisfaction négative, ou un contentement, qui a sa source dans notre personne. La liberté même est de cette manière (c’est-à-dire indirectement) capable d’une jouissance qui ne peut s’appeler bonheur, parce qu’elle ne dépend pas de l’intervention positive d’un sentiment, et qui, à parler exactement, n’est pas non plus de la béatitude *[1], parce qu’elle n’est pas absolument indépendante des penchants et des besoins, mais qui ressemble à la béatitude, en ce sens que la détermination de notre volonté peut du moins s’affranchir de leur influence, et qu’ainsi cette jouissance, du moins par son origine, est quelque chose d’analogue à ce sentiment de sa suffisance **[2] qu’on ne peut attribuer qu’à l’être suprême.

Il suit de cette solution de l’antinomie de la raison pure pratique que dans les principes pratiques on peut (sinon connaître et apercevoir) du moins concevoir comme possible une liaison naturelle et nécessaire entre la conscience de la moralité et l’attente d’un bonheur proportionné à la moralité dont il serait

  1. * Seligkeit.
  2. ** Selbstgenügsamkeit.