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Page:Kant-Critique de la raison pratique, trad. Barni, 1848.djvu/368

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DU CONCEPT DU SOUVERAIN BIEN.


perfection ? Mais l’existence du mal dans le monde leur paraissait une objection beaucoup trop forte, pour qu’ils se tinssent fondés à adopter cette hypothèse. Ils firent donc preuve au contraire d’intelligence et de pénétration, en ne se la permettant pas, et en cherchant plutôt s’ils ne trouveraient pas dans les causes naturelles les qualités et la puissance qu’exige l’être premier. Mais, lorsque ces esprits pénétrants eurent poussé leurs recherches jusqu’à traiter philosophiquement les objets moraux, sur lesquels d’autres peuples n’ont jamais fait que du verbiage, ils rencontrèrent aussitôt un nouveau besoin, à savoir un besoin pratique, qui ne manqua point de leur fournir un concept déterminé de l’être premier ; en quoi la raison spéculative ne joua d’autre rôle que celui de spectateur, ou n’eut tout au plus d’autre mérite que celui d’orner un concept né sur un terrain étranger, et de lui donner par un cortège de confirmations, qu’elle put tirer alors de la contemplation de la nature, je ne dirai pas son autorité (elle était déjà fondée), mais l’éclat d’une apparente connaissance rationnelle théorique.

Après ces observations le lecteur de la critique de la raison pure spéculative comprendra parfaitement combien cette pénible déduction des catégories était nécessaire, combien elle était utile pour la théologie et la morale. En effet c’est par là seulement qu’on peut éviter, quand on les place dans l’entendement pur, de les regarder, avec Platon, comme innées, et