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Page:Kant-Critique de la raison pratique, trad. Barni, 1848.djvu/79

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FONDEMENTS


êtres dont l'existence ne dépend pas de notre volonté, mais de la nature, n’ont aussi, si ce sont des êtres privés de raison, qu’une valeur relative, celle de moyens, et c’est pourquoi on les appelle des choses, tandis qu’au contraire on donne le nom de personnes aux êtres raisonnables, parce que leur nature même en fait des fins en soi, c’est-à-dire quelque chose qui ne doit pas être employé comme moyen, et qui, par conséquent, restreint d’autant la liberté de chacun *[1] (et lui est un objet de respect). Les êtres raisonnables ne sont pas en effet simplement des fins subjectives, dont l’existence a une valeur pour nous, comme effet de notre action, mais ce sont des fins objectives, c’est-à-dire des choses dont l’existence est par elle-même une fin, et une fin qu’on ne peut subordonner à aucune autre, par rapport à laquelle elle ne serait qu’un moyen. Autrement rien n’aurait une valeur absolue. Mais si toute valeur était conditionnelle, et, par conséquent, contingente, il n’y aurait plus pour la raison de principe pratique suprême.

Si donc il y a un principe pratique suprême, ou si, pour considérer ce principe dans son application à la volonté humaine, il y a un impératif catégorique, il doit être fondé sur la représentation de ce qui, étant une fin en soi, l’est aussi nécessairement pour chacun, car c’est là ce qui en peut faire un principe objectif de la volonté, et, par conséquent, une loi pratique universelle. La nature raisonnable existe comme fin en soi, voilà le fondement de ce principe. L’homme

  1. * alle Willkühr.