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Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome premier.djvu/308

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l’une de l’autre, mais qui en même temps ne peuvent être réunies sans effort et sans se faire réciproquement quelque tort, doivent être spontanées et paraître s’être formées d’elles-mêmes ; autrement on manquerait le but des beaux-arts. C’est pourquoi tout ce qui sent la recherche et la peine y doit être évité, car les beaux-arts doivent être libres en un double sens : d’un côté, ; on ne peut les traiter, comme des travaux mercenaires dont on peut juger d’après une mesure déterminée et qu’on peut imposer et payer ; et, d’un autre côté, l’esprit y trouve une occupation, mais aussi un plaisir et une excitation naturelle qui n’a pas d’autre but qu’elle-même (qui est indépendante de tout salaire).

L’orateur donne donc quelque chose, qu’il ne promet pas, à savoir un jeu amusant, de l'imagination ; mais il ôte aussi quelque chose à ce qu’il promet, à l’exercice qu’on attend de lui et qui a pour but d’occuper sérieusement l’entendement. Le poëte, au contraire, promet moins et n’annonce qu’un simple jeu d’idées, mais il nous donne quelque chose digne de nous occuper, car il offre en se jouant une nourriture à l’entendement et en vivifie les concepts par l’imagination. Par conséquent, le premier donne en réalité moins qu’il ne promet et le second, plus.

2. Les arts figuratifs, ou ceux qui cherchent l’expression de certaines idées dans l'intuition sensible