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Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome IX, 1825.djvu/109

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1565. cents et jusqu’à mille roubles, quelquefois même davantage. Il n’y avait pas moyen de s’en tirer : il fallait ou payer sur-le-champ, ou aller à la correction, c’est-à-dire qu’à défaut de satisfaction, l’acusateur avait le droit de traîner son débiteur sur la grande place et de le battre de verges jusqu’à ce qu’il eût acquitté sa dette. Souvent le légionnaire laissait lui-même quelqu’effet dans une riche boutique, d’où il sortait pour revenir ensuite accompagné d’un préposé de la police, et, sous le prétexte qu’on lui avait dérobé l’objet de sa réclamation, il ruinait le marchand : quelquefois il arrêtait un homme en pleine rue et le conduisait au tribunal où il se plaignait d’avoir été outragé ou injurié par lui ; adresser une parole grossière à un opritchnik eût été insulter le tzar lui-même : en pareil cas, l’innocent accusé ne pouvait éviter les peines corporelles qu’en payant une forte somme : en un mot, depuis le gentilhomme jusqu’au bourgeois, tous les citoyens de la commune étaient attérés et muets devant un légionnaire. Les premiers, disent les annales du temps, étaient le gibier ; les seconds, les chasseurs. Épouvantable état de choses toléré par Jean, qui voulait pouvoir compter sur le zèle de ses sicaires dans l’exécution des nouvelles cruautés qu’il méditait ! Plus