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Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome IX, 1825.djvu/453

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1582. la terre, contre le cercueil de son malheureux fils.

Voilà comment les justes arrêts du vengeur céleste tombent quelquefois, dans ce monde même, sur des monstres d’inhumanité, plutôt pour l’exemple que pour changer leur cœur pervers ; car il existe dans le crime des limites au-delà desquelles il semble qu’il n’y ait plus de repentir sincère, plus de libre et décisif retour au bien. En proie à des tourmens qui anticipent sur ceux des enfers, ils achèvent sans espérance leur coupable carrière. Depuis long-temps le tzar avait franchi cette limite fatale, et le retour d’un pareil monstre à la vertu aurait pu scandaliser les esprits faibles…. Pendant quelques jours abandonné aux plus violentes angoisses, il ne connaissait plus les douceurs du sommeil. Au milieu des nuits, comme épouvanté par des spectres, il se réveillait en sursaut, tombait de son lit, se roulait par terre, en poussant de lamentables cris ; état affreux que l’épuisement de ses forces parvenait seul à calmer ! Alors étendu sur un matelas qu’on lui préparait d’avance, un assoupissement momentané suspendait ses remords ; il appelait et redoutait l’aube matinale, craignant de voir les hommes et de leur montrer sa physionomie empreinte des tourmens de l’infanticide.