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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/158

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lui conseillait de l’arranger pour la scène. Nous partageons entièrement l’avis de Balzac et nous trouvons même qu’aucune des pièces de George Sand, représentées avec succès, fût-ce même le Marquis de Villemer si préconisé, n’a, selon nous, ni cette force de vie, ni cette vivacité d’action que l’on trouve dans Gabriel. Et une fois encore, le ton, le coloris, les types, le dialogue, tout porte le cachet de l’influence indéniable de Musset. Et la beauté de la forme fait que cette œuvre n’a aucunement vieilli.

Nous ne dirons rien ici de Jacques dont nous avons déjà parlé plus haut, et dont nous parlerons encore plus loin. Leone Leoni, un des romans qui a eu le plus de succès en son temps auprès des contemporains, a maintenant beaucoup vieilli. George Sand avait, on le sait, l’intention de faire le pendant de Manon Lescaut, mais, dans son roman, le rôle de la pécheresse tentatrice est attribué au viveur byronisant, Leone Leoni, et celui de Desgrieux, périssant par amour pour Manon, à une jeune fille nommée Juliette. En son temps Leone Leoni, exerça une très grande influence sur la jeunesse. Beaucoup de ses lecteurs virent dans ce roman l’expression complète de cet amour sublime et plein d’abnégation, qui, après avoir foulé aux pieds les préjugés reçus et tout respect humain, après avoir tout sacrifié, fermé les yeux de la femme aimante sur toutes les faiblesses, les défauts, voire même sur les vices et les crimes, l’oblige à suivre l’être aimé à l’autre bout du monde et à partager avec lui ses malheurs et son déshonneur.

C’est ainsi que Liszt, par exemple, comprenait Leone, — roman qui joua dans sa vie un rôle funeste, car son apparition au moment même où se décidait le sort des amours de la comtesse d’Agoult pour le jeune pianiste, fit suivre, à ce qu’il paraît, à cette tête exaltée, l’exemple de