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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/240

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famille d’armateurs, plus tard ruinée par la Révolution. Après des études faites au sein de sa famille, il entra avec son frère au séminaire, se fit prêtre en même temps que lui, avec beaucoup d’hésitations et de doutes, il est vrai, mais ensuite il prit à cœur sa vocation ecclésiastique et consacra toutes ses forces à la prédication chrétienne, dans le sens le plus pur du mot. Il fut d’abord considéré comme un des défenseurs les plus orthodoxes de l’Église, et se distingua par ses attaques contre les philosophes, la Révolution et Napoléon, puis il se fit leur ennemi acharné. Deux fois il fut appelé à Rome pour expliquer sa conduite, et cela, après qu’on avait failli faire de lui un cardinal, parce qu’on le regardait comme un vrai champion de la papauté ; deux fois il fut condamné par cette même Église qu’il avait voulu défendre, et dut renier publiquement ses opinions. Peu à peu, dans le journal l’Avenir qu’il avait fondé avec ses amis, le comte de Montalembert, et les abbés Gerbet et Lacordaire qui partageaient entièrement ses idées, il s’éloigna tellement de ses premiers écrits qu’il s’attira non seulement la condamnation de l’Église romaine, mais qu’il rompit avec son frère et ses amis, et qu’il s’aperçut enfin lui-même, de son désaccord fondamental avec le catholicisme. L’apparition de son livre : les Paroles d’un croyant le fit excommunier. Il ne cessa cependant de se regarder comme le serviteur de Dieu, il continua à dire la messe comme auparavant : il fut enfin anathématisé. Il devint alors un des acteurs les plus ardents du mouvement social et républicain sous le gouvernement de Louis-Philippe, fut membre de l’Assemblée nationale en 1848 et resta jusqu’à la fin de sa vie l’apôtre infatigable du socialisme chrétien et le champion de la liberté de conscience. Il avait un talent poétique extraordinaire, une éloquence sombre et