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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/304

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chacun selon son mérite et ses capacités. Adieu, porte-toi bien, je t’embrasse de tout mon cœur, ainsi que la grosse Solange. Tout à toi.

« Dudevant. »

Et lorsqu’Aurore fut partie avec Musset pour l’Italie, Casimir lui envoya même là-bas des lettres absolument gentilles et s’éleva jusqu’au lyrisme pour lui conseiller de ne pas regarder d’un œil distrait et tranquille ce pays où son père, Maurice Dupin, s’était autrefois battu, dont les champs avaient été arrosés du sang des soldats français et où tout parlait des gloires d’autrefois[1]. Il n’y a qu’une seule chose que l’on ne trouve jamais dans ses lettres : reproches, quels qu’ils fussent, prières de rentrer au foyer conjugal, en un mot, aucun regret de la séparation. Selon toute apparence, Casimir, tout comme Aurore, était parfaitement content de ce nouvel arrangement.

Mais ces relations amicales finissaient toujours par s’altérer chaque fois qu’Aurore séjournait quelque temps à Nohant ; les premiers jours, les choses se passaient bien et paisiblement, mais bientôt reparaissaient la brutalité, les paroles outrageantes, les menaces, les cris. À cela venait encore s’ajouter le reproche adressé à Aurore de ce qu’elle « dérogeait » par son métier d’écrivain. Fréquemment, Casimir se déchaînait contre ses enfants, qui n’étaient nullement fautifs, surtout contre Solange, qu’il prit en grippe. Ces scènes pénibles se renouvelèrent de plus en plus en l’automne de 1834, quand, après son voyage en Italie, brisée moralement et physiquement malade. Aurore sentit vive-

  1. Au chapitre viii, en parlant des excursions de George Sand avec Pagello à Bassano, Parolino, etc., nous avons cité plusieurs passages de la réponse d’Aurore à cette lettre.