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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/323

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Se fondant là-dessus, le tribunal prononça la séparation de corps et d’habitation de Mme Dudevant d’avec son mari, « défendant à celui-ci de la hanter et fréquenter sous telle peine qu’il appartiendra, » ordonna que les enfants issus de ce mariage resteraient à la garde de la mère qui devrait, selon ses moyens, subvenir à leur entretien et aux frais de leur éducation, et enfin renvoya les parties à se régler sur leurs droits respectifs, etc…

À l’arrivée du printemps, George Sand avait quitté les Duteil pour aller demeurer chez d’autres amis, les Bourgoing, dont la maison, plus fraîche que celle des Duteil, se trouvait tout au bout de la ville à l’emplacement des anciens remparts ; elle dominait un ravin au fond duquel coulait l’Indre ; une large plaine bordée à l’horizon de forêts s’étendait devant elle. Par la fenêtre de sa chambre Aurore pouvait descendre dans le jardinet rempli de roses et « perché en terrasse sur un précipice » et jouir de là d’une vue splendide. C’est cette maison avec son jardinet et son ravin qu’elle décrivit plus tard dans Jeanne. On peut la voir encore aujourd’hui à côté de la grise et antique tour de la prison de La Châtre.

Dans le cours du printemps et de l’été 1836, poussée par le changement qui s’était opéré en elle sous l’influence des idées de Michel, de Lamennais et de Liszt, George Sand voulut refaire Lélia dont le scepticisme et l’individualisme désespérés ne répondaient plus à sa manière actuelle de comprendre les choses. Et effectivement passant les journées en causeries et en jeux avec ses grands et petits amis, elle se remit à travailler la nuit, souvent jusqu’aux premiers rayons du soleil, refaisant et changeant Lélia. Elle y ajouta, nous le savons, tout un volume. Parfois, lorsque tout s’était calmé dans la maison et que seules les étoiles regardaient